La loi sur les stupéfiants fait la distinction entre l’infraction simple et l’infraction grave. Alors que l’infraction simple de l’article 19 al. 1 LStup prévoit une peine privative de liberté pouvant aller jusqu’à trois ans, le cas grave de l’art. 19 al. 2 LStup entraîne une peine privative de liberté d’un minimum d’un an et d’un maximum de vingt ans. Tel est notamment le cas lorsque l’auteur sait ou ne peut ignorer que l’infraction peut directement ou indirectement « mettre en danger la santé de nombreuses personnes » (art. 19 al. 2 let. a LStup). Cette formulation contient une condition objective (la mise en danger, directe ou indirecte, de la vie de nombreuses personnes) et une condition subjective (le fait que l’auteur le sache ou ne puisse l’ignorer). Ces deux conditions sont cumulatives.

Dans un arrêt de 1983 le Tribunal fédéral, se fondant sur une expertise établie par des spécialistes issus de plusieurs universités suisses, avait fixé les quantités à partir desquelles il devait être considéré qu’il existait un risque de dépendance pour 20 personnes – soit le nombre de personnes à partir duquel il fallait considérer que la condition des « nombreuses personnes » était remplie, permettant de retenir le cas aggravé de l’art. 19 al. 2 let. a LStup.

Ainsi, ces seuils avaient été fixés dans cet arrêt et dans des arrêts ultérieurs à :

  • 12 grammes d’héroïne,
  • 18 grammes de cocaïne,
  • 200 trips de LSD,
  •  36 grammes d’amphétamines.

En revanche, selon la jurisprudence, le cas aggravé résultant de la mise en danger de la santé de nombreuses personnes ne peut pas être réalisé en présence de drogues dites ” douces ” telles que celles dérivées du cannabis ou l’ecstasy.

En substance à chaque apparition d’une drogue nouvelle se pose la question de savoir si cette drogue peut mettre en danger la santé de nombreuses personnes et quel est le seuil à partir duquel cette mise en danger intervient.

Ainsi, s’agissant de crystal meth le Tribunal fédéral a, dans un récent arrêt 6B_504/2019 du 29 juillet 2019, clarifié cette question et doublement confirmé un arrêt neuchâtelois.  

D’abord il a confirmé que, dans le cas de la crystal meth en poudre et non sous forme liquide, une quantité de 12 grammes était propre à mettre en danger la santé de nombreuses personnes et à réaliser le cas aggravé de l’art. 19 al. 2 LStup. Pour ce faire le Tribunal cantonal neuchâtelois s’était fondé sur une étude réalisée en 2010 de la société suisse de médecine légale.

Ensuite il a retenu, toujours sur la base de statistiques effectuées par la Société suisse de médecine légale, que le taux de pureté de la crystal meth en Suisse pour l’année 2016 était de 77 % avec une marge d’erreur de plus ou moins 6,9 %, à savoir 69% au taux le plus favorable à l’accusé. Ce taux de pureté correspondait au demeurant aux résultats d’une étude effectuée en 2018 par l’Université de Lausanne et le CHUV concluant que la crystal meth apparue en Suisse dès 2011 présentait généralement un taux de pureté supérieur ou égal à 70%.

L’accusé avait remis à des tiers 28 grammes de crystal meth. A un taux de pureté moyen de 69 %, cela correspondait à 19,32 grammes. Le seuil du cas grave étant fixé à 12 grammes, l’accusé s’était dès lors rendu coupable d’infraction grave à la Loi sur les stupéfiants.

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