C’est une décision de la Cour de cassation française du 22 octobre 2019, mais dont le raisonnement pourrait parfaitement être appliqué en droit suisse.

En 2008, un schizophrène hospitalisé dans un hôpital psychiatrique obtient une autorisation de sortir dans le parc de l’hôpital. Il en profite pour s’échapper, puis s’acheter un couteau avec lequel il va ensuite poignarder à mort un jeune homme.

Jugé irresponsable, le schizophrène ne sera pas sanctionné. Difficile de s’arrêter là pour les proches de la victime. Il doit bien y avoir un responsable, un coupable, autrement dit quelqu’un qui a commis une faute et qui doit être sanctionné.

Ce responsable sera donc le médecin psychiatre qui suivait le schizophrène et qui l’a – fautivement – laissé sortir dans le parc sans surveillance. Le psychiatre sera donc poursuivi pour homicide involontaire, l’équivalent de l’homicide par négligence en droit suisse (art. 117 CP), et condamné.

Contre l’arrêt de la Cour d’appel le condamnant à 18 mois de prison avec sursis, le psychiatre se pourvoit en cassation (équivalent d’un recours en matière pénale au Tribunal fédéral en droit suisse). La cour de cassation rejette son pourvoi et confirme la condamnation.

En substance, d’après ce que les médias nous rapportent de la décision de la Cour de cassation française:

” (Le psychiatre) a commis une faute caractérisée consistant à s’être abstenu, avant toute décision relative à la mise en place ou au maintien d’une autorisation de sortie non surveillée (…) dans le parc non clos de l’établissement, d’approfondir le parcours du patient, de prendre connaissance de ses antécédents psychiatriques et de procéder à un ou plusieurs examens approfondis “.

Pour retenir la culpabilité pénale du psychiatre, la Cour de cassation a en outre considéré qu’il existait un lien de causalité entre la faute du médecin et l’homicide.

Nous publierons l’arrêt de la Cour de cassation dès que celui-ci aura été mis en ligne dans la mesure où cette problématique n’est pas limitée au seul droit français.

A ce stade toutefois, on peut déjà s’interroger quant aux conséquences d’une telle décision sur la pratique des médecins psychiatres confrontés à des patients schizophrènes notamment. Très vraisemblablement – et cela se conçoit parfaitement – peu sont ceux qui seront prêts à assumer la responsabilité pénale des infractions commises par leurs patients. Une tendance devrait dès lors naturellement se dessiner vers une recherche du risque zéro (pour la collectivité certes, mais aussi pour les psychiatres désormais), ce qui se fera inévitablement au détriment des patients et de leurs droits.

En effet, et pour autant qu’il existe, qu’est-ce que le risque zéro en psychiatrie ? Enfermement, médication massive, …

D’autres idées ?

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