Un homme averti en vaut deux …
La crise sanitaire mondiale due au COVID-19 fragilise physiquement et psychologiquement la population mondiale amenant cette dernière à devenir une cible plus facile pour les malfaiteurs.
Les criminels profitent de cette situation exceptionnelle, et de la peur qu’elle engendre, pour s’enrichir en adaptant et diversifiant leurs activités. Cependant, il est intéressant de relever que, de manière générale, les activités criminelles, ainsi que les modes opératoires appliqués par les malfaiteurs, n’ont pas particulièrement changé durant la pandémie. En effet, INTERPOL constate principalement, depuis l’apparition du COVID-19, une augmentation des contrefaçons de produits médicaux, des escroqueries et de la cybercriminalité (https://www.interpol.int/fr/Notre-action/COVID-19), activités criminelles déjà connues avant la pandémie.
Tout d’horizon de la criminalité économique autour du Covid-19
En ces temps de pandémie, la criminalité financière va du simple vol ou fraude commis par des individus malintentionnés à des opérations d’envergure orchestrées par des criminels organisés présents sur tous les continents. Voici quelques exemples représentatifs :
- Escroquerie par téléphone: Les criminels appellent les lésés et leur font croire qu’ils sont des employés d’une entité sanitaire ; ils prétendent qu’une personne proche du lésé a contracté le Covid-19 et lui demandent de payer son traitement médical (https://www.interpol.int/fr/Infractions/Criminalite-financiere/Criminalite-financiere-ne-tombez-pas-dans-le-piege).
- Infractions liées à l’attribution des crédits Covid-19 garantis par la Confédération Suisse: En Suisse, afin d’assurer aux entreprises en difficulté financière les liquidités nécessaires à leur survie, des crédits Covid-19 ont été attribués à environ 136’000 sociétés suisses. Cependant, profitant d’une procédure d’octroi de prêts Covid-19 simplifiée et rapide, des entreprises sont soupçonnées d’avoir commis des infractions, en particulier des escroqueries (https://www.rts.ch/info/suisse/11562721-plus-de-400-prets-durgence-de-la-confederation-sous-enquete-penale.html). En effet, selon les statistiques produites et publiées par le Secrétariat d’État à l’économie (SECO), il existe actuellement plus de 800 cas d’abus potentiels en cours de clarification et 79 procédures en cours pour un montant délictueux total d’environ CHF 14 millions (https://covid19.easygov.swiss/fr/pour-les-medias/). De plus, le Bureau suisse de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS) a dénoncé plus de 400 cas liés à l’attribution des prêts Covid-19 pour blanchiment d’argent aux autorités de poursuite pénale (https://www.fedpol.admin.ch/fedpol/fr/home/kriminalitaet/geldwaescherei/ueberbrueckungskredite.html).
- Escroquerie par défaut de livraison: Les criminels dupent leurs victimes cherchant à acheter des articles très recherchés en ces temps de pandémie, par exemple des masques chirurgicaux et autres fournitures médicales, au moyen de faux sites Web, boutiques, comptes de médias sociaux ou adresses e-mail. Puis, ils empochent l’argent et ne procèdent jamais à la livraison (https://www.interpol.int/fr/Infractions/Criminalite-financiere/Criminalite-financiere-ne-tombez-pas-dans-le-piege). Dans ce schéma criminel, il faut être conscient du fait que les lésés ne sont pas uniquement des particuliers, mais peuvent être également les autorités sanitaires d’un Etat. Le type d’activités relève alors plus du crime organisé que de la simple fraude. Comme exemple, il y a lieu de mentionner qu’INTERPOL a coordonné récemment une enquête internationale concernant une escroquerie élaborée combinant adresses de messageries piratées, avances de fonds frauduleuses et blanchiment d’argent visant les autorités sanitaires allemandes (https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/Bas-les-masques-une-escroquerie-internationale-au-COVID-19).
- Le commerce frauduleux et la vente de contrefaçons d’équipements médicaux : Apparenté à l’escroquerie par défaut de livraison susmentionnée, la vente de contrefaçons d’équipements médicaux est réalisée en contrepartie de la livraison d’une marchandise bien réelle, mais de mauvaise qualité et donc dangereuse (https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/Une-operation-mondiale-met-au-jour-une-augmentation-des-faux-produits-medicaux-dans-le-contexte-de-la-COVID-19).
- Les cyberattaques : Un rapport d’INTERPOL fait état d’un taux de cyberattaques très préoccupant durant le COVID-19. Il relève également que le type de lésés par ces cyberattaques en temps de pandémie a changé. En effet, les attaques ciblent actuellement davantage les grandes sociétés, gouvernements et infrastructures essentielles que les particuliers et les petites entreprises. Une des raisons de l’évolution du type de cibles est le fait que la crise sanitaire a poussé les organisations et les entreprises à favoriser les systèmes distants et les réseaux permettant le télétravail du personnel. Les malfaiteurs utilisent alors des faiblesses en matière de sécurité pour obtenir ou soustraire des données et engendrer ainsi des bénéfices. Les principales attaques sont notamment les escroqueries en ligne, les logiciels malveillants contre des infrastructures hospitalières avec demandes de rançons, les sites web frauduleux concernant le Covid-19, ainsi que la désinformation incluant des logiciels malveillants (https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/Un-rapport-d-INTERPOL-fait-etat-d-un-taux-de-cyberattaques-tres-preoccupant-durant-le-COVID-19 ; https://www.melani.admin.ch/melani/fr/home/themen/covid-19.html). L’OMS, quant à elle, a sensibilisé la population au fait que son identité a été usurpée dans le cadre de campagnes de courriels et de messages WhatsApp incitant le destinataire à cliquer sur des liens malveillants ou à ouvrir des pièces jointes dans le but de collecter des noms d’utilisateurs et des mots de passe afin de détourner des valeurs patrimoniales (https://www.who.int/about/communications/cyber-security).
- Le trafic de migrants: Les trafiquants profitent des différentes mesures prises pour ralentir la propagation du Covid-19 afin de gagner plus d’argent. En effet, en utilisant de fausses informations, ils arrivent à persuader des personnes vulnérables d’utiliser leurs services à un tarif élevé à plus forte raison que les restrictions de déplacements rendent le voyage plus difficile (https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/L-impact-du-COVID-19-sur-le-trafic-de-migrants-et-la-traite-d-etres-humains).
- Les activités mafieuses: Durant cette période exceptionnelle, la mafia risque notamment de blanchir de l’argent en prêtant des liquidités nécessaires à certains petits entrepreneurs en difficulté financière en raison de la crise sanitaire (https://www.laliberte.ch/news-agence/detail/face-au-coronavirus-la-mafia-plie-mais-ne-rompt-pas/558783).
Réactions des autorités et leurs recommandations
Après ce large tour d’horizon, mais cependant non-exhaustif, de la criminalité financière en ces temps de pandémie, il est légitime de se demander quelle est la réaction des autorités face à l’émergence de cette criminalité et si celles-ci émettent des recommandations ou conseils.
Au niveau international, INTERPOL mentionne alerter périodiquement ses membres au sujet des menaces rencontrées. De même, cette organisation a publié un rapport et un guide à ce sujet destinés aux différents services de police. De plus, elle informe régulièrement le public sur son site internet, Twitter, Facebook et LinkedIn (https://www.interpol.int/fr/Actualites-et-evenements/Actualites/2020/Prevenir-la-criminalite-et-proteger-la-police-INTERPOL-publie-une-evaluation-des-menaces-mondiales-liees-au-COVID-19; le lien internet concernant le soutien d’INTERPOL au public est : https://www.interpol.int/fr/Notre-action/COVID-19).
En suisse, les différentes polices cantonales diffusent sur leur site internet et par les réseaux sociaux des recommandations, ainsi qu’une sensibilisation à la problématique (Exemples : https://www.policevalais.ch/communiques-pour-les-medias/coronavirus-attention-aux-arnaques/; https://votrepolice.ch/cybercriminalite/cybercriminalite-et-coronavirus/). La Centrale d’enregistrement et d’analyse pour la sûreté de l’information (MELANI) émet également des recommandations générales (https://www.melani.admin.ch/melani/fr/home/themen/covid-19.html).
Conclusion
Autant les malfaiteurs isolés que les organisations criminelles d’envergure ont trouvé, en ces temps de pandémie, de nouvelles opportunités de s’enrichir en exerçant leurs activités criminelles tout en n’étant pas obligés de modifier de manière significative leurs modes opératoires.
Il est donc possible de dire que la crise engendrée par le Covid-19 a été bénéfique à la criminalité économique.
Face à cette vague de criminalité à multiples facettes, les autorités ont su réagir en se coordonnant et en diffusant de nombreux conseils sur internet et par les réseaux sociaux afin que le grand public soit sensibilisé aux risques et sache comment réagir face à une menace.
En effet, en matière de criminalité économique, mieux vaut prévenir que guérir.
On rappellera que l’Institut de lutte contre la criminalité économique (ILCE) mène actuellement une étude sur les fraudes et les abus économiques liés au Covid-19. Les témoins ou lésés d’une fraude, d’un acte de cybercriminalité ou d’un abus économique lié au COVID-19 peuvent partager leur vécu sur le site dédié www.coronafraude.ch.